L'Echo du soir
L’echo du soir
Il avait beau résonner, de jour en jour, sur les coteaux au loin, inlassable, personne ne
l’entendait. Pas même lui.
Les gens du villages filaient, inattentifs à ce qui se jouait si près d’eux.
Mais lui, fidèle à son poste, le pas de côté lui étant impossible, on l’aurait cru figé.
Il restait calme, Zen comme on dit aujourd’hui.
Rien ne semblait l’inquiéter, l’agiter.
Et pourtant son cœur vibrait au moindre souffle. Souffle de silence peut-être qu’il
adressait alentour.
Etais-ce le témoignage d’une peur enfouie, de secrets qu’il gardait en lui, de secrets qui
lui tournaient autour sans qu’il ose les entendre, qu’il ose ouvrir la boîte ?
Pourtant son visage montrait des traits tirés, une attitude hésitante, laissant
penser à un animal prêt à bondir, sur le qui-vive et qui ne demandait qu’à vivre sa vie
d’écho : s’entendre rire, danser, chanter dans le vent et s’entendre enfin face à lui-
même.
Oui, jour après jour, il rêvait de se rouler dans les champs de blé, de s’affronter aux
parois rocheuses à l’arrière des collines. Et déjà il s’imaginait déployer avec fougue,
sa voix et déployer la puissance de son souffle.
Un jour d’entre les jours, curieusement il prit conscience qu’à chaque jour
succédaient les nuits, et qu’il était temps d’agir mais aussi de permettre à chacun, tout
comme il le découvrait pour lui, de s’entendre.
Et ce jour là, il perçut pour la première fois le soir qui tombait. Il entendit alors l’écho
de ce soir-là. Il perçut l’écho de tous les soirs passés et à venir. Il perçut l’écho du soir
qui renvoyait aux villageois des réponses à leurs interrogations, simplement, en
s’écoutant parler, chanter et vivre.
Il s’appelait l’écho du soir.
Sylvie Domenjoud le 26/02/23